L’IA owner

L’impact de l’IA Générative en entreprise fait l’objet de nombreuses études. Un chiffre a retenu récemment notre attention : seulement 5% des pilotes passeraient au stade de production (1)…

Plusieurs raisons sont avancées : incapacité des modèles à apprendre des processus internes, à s’adapter aux workflows spécifiques, volonté des entreprises de développer des solutions internes, périmètres d’usage mal ciblés…

Chacun pourra se faire son opinion sur les chiffres et les raisons.

Néanmoins, il nous semble manquer au moins une raison supplémentaire pour expliquer la difficulté à pérenniser l’usage de l’IA dans la durée : en cas de déploiement, qui seront les véritables “IA owners”, responsables de faire vivre ces usages au sein de l’organisation? Seront-ils/elles prêts à assumer cette responsabilité – et surtout leur a-t-on demandé leur avis ?

Data et « IA owners » : les identifier et les convaincre

« Liberté implique responsabilité. C’est là pourquoi la plupart des hommes la redoutent », aurait écrit Georges Bernard Shaw en 1927 dans le Bréviaire du révolutionnaire, extrait de sa pièce de théâtre “Man and Superman”. Albert Einstein aurait paraphrasé cette idée quelques années plus tard. Or en matière de données et d’intelligence artificielle, c’est cette liberté que réclament de plus en plus les utilisateurs métier. Leur faire accepter les responsabilités qui vont avec, semble parfois plus compliqué… mais ces quelques conseils vous aideront à franchir ce pas indispensable.

Identifier et non désigner

Tout d’abord une responsabilité, comme une liberté, cela ne se décrète pas. Cela se prend. Forcer quelqu’un à être responsable / référent de données ou d’un processus d’IA, créé plus de problèmes qu’il n’en résout. Les référents IA, ou « IA owners », doivent donc être identifiés. Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’ils sont référents IA, de fait, parce qu’ils sont à l’origine, demandeurs, ou utilisateurs de ce traitement. Espérons que votre organisation n’a pas déployé de processus d’intelligence artificielle sans s’assurer qu’ils répondent à un besoin métier… il y a donc un demandeur, quelqu’un qui a exprimé des attentes, et qui sera sans doute le bénéficiaire des résultats obtenus par l’IA mise en œuvre. C’est naturellement lui le « IA owner ». Comme en matière de données, le mot est trompeur, il n’est en réalité propriétaire de rien. Mais il est celui qui du point de vue fonctionnel connait le mieux ce traitement, qu’il s’agisse d’un chatbot, d’un modèle d’apprentissage machine, ou d’IA générative. Il a exprimé des besoins, a quantifié des objectifs métier à atteindre, a dialogué avec le département informatique ou le prestataire pour coordonner le développement, a fourni des données, a testé les résultats… et encadre ou encadrera son usage quotidien.

Tout modèle d’IA, quel qu’il soit, doit avoir un IA owner. Il peut être le même que le data owner des données qui alimentent cette IA, mais ce n’est pas une obligation. S’il s’agit d’un modèle interne au département informatique, par exemple un modèle de détection de SPAM dans les emails reçus, son référent sera interne au département informatique. Dans tous les autres cas, le référent IA sera côté métier.

Principale objection d’un référent qui a du mal à reconnaitre son implication : l’aspect technique de l’IA. « C’est de l’informatique », « Je n’y comprends rien », «  Je ne suis pas développeur »… entendrez-vous régulièrement. L’idée n’est absolument pas de transformer en développeur IA votre responsable logistique ou comptable. Il travaillera main dans la main avec les développeurs, les « AI engineers » qui sélectionneront les modèles, les personnaliseront, les déploieront. Mais rien de tout cela ne doit se faire sans la validation et le contrôle du métier.

Quel bénéfice pour le référent IA d’être identifié dans ce rôle ? C’est bien grâce à son travail lors du développement, tout comme lors de l’exploitation, que sont obtenus les bénéfices de cette IA. Efficacité, productivité, ces gains seront affectés au référent IA coté métier. Le rôle de l’informatique est essentiel, mais uniquement comme celui d’un outil, qui permet de réaliser une tâche. Lorsque vous utilisez un marteau pour planter un clou, le bénéficie du clou est-il à affecter au fabriquant du marteau ou à la main qui a utilisé le marteau à bon escient ? Pensez-y et vous verrez que l’identification des IA owners métier permet de renforcer le déploiement d’intelligences artificielles efficaces, rentables et gouvernées.

Le positionnement du “IA owner” dans l’organisation : ni trop, ni pas assez

Certains choisissent, à tort, de nommer les directeurs de services à ce rôle de référent des processus IA, comme s’il s’agissait d’une distinction. Peut-être pensent-ils qu’ainsi le métier saura imposer ses idées en comité de direction. Comme dit plus haut, il ne faut pas nommer, mais identifier ce rôle. Or ce n’est pas le directeur de la production qui est personnellement à l’origine de l’idée d’un algorithme d’apprentissage machine pour réduire la production de déchets lors des opérations de fabrication ; ou le directeur des risques qui aurait l’idée de l’ensemble des systèmes de détection de fraudes possibles. Identifier les référents IA au niveau de la direction ne répond pas au critère principal : est référente IA la personne qui connait le mieux le processus. Loin de nous l’idée de dévaloriser nos directeurs ! Mais ils ne peuvent pas tout savoir et tout faire. Ils délèguent. Et c’est justement à ces personnes en charge de l’opérationnel que reviennent les droits et les devoirs liés à ce rôle de référent IA.

Autre inclination, renvoyer la paternité des processus IA vers l’informatique. C’est de la technique, c’est du code, je ne comprends pas donc je ne peux pas être référent… Réaction classique, mais qui évolue avec les nouvelles générations bien plus enclines à manipuler elles-mêmes leurs données, à développer des mini-applications en no-code, et donc à superviser le déploiement de modèles d’IA. Le métier peut et doit s’intéresser à ces nouveaux outils ; sans forcément en maitriser le développement lui-même, mais tout au moins en comprendre les enjeux, la gouvernance, les contraintes et les bénéfices obtenus.

Des contraintes et des opportunités pour les “IA owners”

Être référent d’un ou de plusieurs processus IA implique des bénéfices et quelques contraintes. Tentons de les résumer ci-dessous :

Commençons par les mauvaises nouvelles, les contraintes :

  • Maintenir à jour le catalogue des traitements d’intelligence artificielle, afin de permettre au DPO et/ou aux équipes Conformité de s’assurer du respect des règles ; et permettre aux autres utilisateurs métier de savoir que ce traitement existe et qu’ils peuvent demander au référent d’y accéder.
  • Un peu de documentation à rédiger et à maintenir. La gouvernance s’appuie sur une documentation à jour des données, des modèles et des usages. C’est au référent IA de maintenir cette documentation à jour.

Mais les bonnes nouvelles arrivent également :

  • Coordonner les travaux de PoC, de déploiement, de récupération des données, d’exécution des modèles, d’exploitation des résultats, tout cela bien sûr en s’appuyant sur le département informatique, mais toujours en privilégiant la réponse à des questions métier.
  • Être identifié comme celui grâce à qui ce traitement IA a été mis en production. Vous faites gagner du temps, de la productivité, de l’argent, à votre organisation : c’est bien grâce à vous ! A utiliser lors de votre entretien annuel en chiffrant l’apport réalisé.
  • Participer aux travaux liés à la gouvernance de l’IA, et vous impliquer à un niveau organisationnel intéressant, vous permettant de mettre en valeur vos réalisations.
  • Travailler en interaction avec les autres parties prenantes : informatique pour le développement, DPO / Conformité pour la gouvernance, etc.

Chaque IA owner doit disposer d’un cockpit de pilotage !

Si votre avion est le processus IA dont vous êtes le référent, vous avez besoin des bonnes données et des bons outils pour le piloter. C’est ici qu’intervient notre cockpit. Chaque processus IA dispose de son propre tableau de bord dans lequel sont centralisées les informations sur les données en entrée, les modèles, les usages…

Et chaque référent IA dispose d’un cockpit lui permettant de naviguer dans ces tableaux de bord, de passer d’une vue globale à un indicateur plus détaillé. Ce cockpit est l’outil indispensable du référent IA.Illustration d’un cockpit de pilotage des risques liés à l’IA – smartcockpit®Illustration d’un cockpit de pilotage des risques liés à l’IA – smartcockpit®Illustration d’un cockpit de pilotage des risques liés à l’IA – smartcockpit®

Contenu de l’article
illustration d’un cockpit pour l’IA owner – smartcockpit

Sources : (1) – The GenAI Divide STATE OF AI IN BUSINESS 2025